Comment les résultats de la population des boursiers de l’enseignement supérieur peut éclairer sur ceux des internes de la réussite

Pour pouvoir évaluer la performance aux concours malgré la méconnaissance de l’identité des internes de la réussite, nous avons envisagé une catégorie plus vaste, constituée des boursiers de l’enseignement supérieur. Par des moyens légaux, nous avons en effet pu nous informer sur l’identité des élèves ayant présenté un dossier de bourse aux concours pour obtenir des exonérations partielles ou totales de frais de concours. Environ 70 élèves par an sont dans cette situation, parmi eux la trentaine d’internes de la réussite présente en général les niveaux de bourses les plus élevés : la logique sociale (vérifiée par l’expérience) veut que ceux ayant de tels niveaux de bourses ont en moyenne des résultats scolaires significativement moins bons que ceux ayant les plus bas niveau de bourses (échelon 0bis).

Ainsi, les résultats globaux des boursiers doivent logiquement constituer, avec une population suffisamment vaste, une borne supérieure pour les résultats des internes de la réussite. Si en particulier ils sont déjà significativement moins bons que ceux des autres élèves de Ginette, alors les résultats des internes de la réussite doivent l’être aussi, et encore davantage.

Nous pouvons maintenant présenter l’étude sur la réussite relative des boursiers du supérieur par rapport aux autres élèves de Ginette, dans chacune des cinq filières MP, PSI, PC, EC et BCPST.

On rappelle que la proportion normale moyenne dans chaque décile est … de 10% !

Filière MP (trois classes)

La position médiane des boursiers du supérieur est au tout début du 8e décile (contre le début du 6e pour la population générale).

Le nombre de boursiers dans le dernier décile est tellement important que, malgré le faible poids des boursiers dans la population générale, les non-boursiers ont une probabilité beaucoup plus faible que les boursiers d’atterrir dans le dernier décile :

Parmi les boursiers, la proportion de ceux qui atterrissent dans le dernier décile en filière MP est de 25%, alors qu’elle n’est de 7,8% pour les non-boursiers. Ainsi, les boursiers qui sont passés en deuxième année en MP* ou en MP ont une probabilité trois fois supérieure de se retrouver dans la plus faible zone de performance que leurs camarades non-boursiers.

Filière PSI (une classe)

Ici, les résultats des boursiers du supérieurs semblent tout à fait comparables à ceux des non-boursiers.

Ni la position médiane ni la position moyenne des boursiers du supérieur ne dévient significativement de celles du reste de la population.

Filière PC (trois classes)

Ici, le boursier du supérieur médian se situe au début du 7ième décile.

Filière EC (deux classes)

Le profil de l’histrogramme est assez similaire à celui observé en filière PC, avec une position médiane des boursiers du supérieur en tout fin de 6e décile.

Filière BCPST (une classe)

On trouve ici un profil très décalé vers le bas, pire encore qu’en filière MP. La significativité du résultat doit être modérée par la faiblesse de l’effectif.

En termes d’intégrations virtuelles :

Les distributions précédentes peuvent être illustrées par un raisonnement en termes d’intégrations virtuelles. Prenons le cas de la filière MP : en moyenne, un tiers d’une promotion intègre Polytechnique ou l’ENS Ulm (concours MPI). On va donc considérer que c’est systématiquement le meilleur tiers sur du classement envisagé qui rentre à Polytechnique, et on peut alors examiner le taux de réussite virtuel correspondant dans la population des boursiers du secondaire.

Ainsi, en MP*/MP :

Alors que 33,3% de la population globale intègre virtuellement Polytechnique, seulement

24,4% de la population des boursiers du supérieur l’intègre.

Alors que 66,6% de la population globale intègre virtuellement Centrale-Supelec, les Ponts et Chaussées ou des écoles plus cotées, le taux d’intégration virtuelle descendrait à environ 48% pour les boursiers du supérieur.

Alors que 10% de la population globale intègre virtuellement les écoles les moins cotées, ce taux monte à 25% pour les boursiers du supérieur.

Avec ce calcul, on obtient la réalité suivante : si la réussite globale d’une promotion reflétait celle des résultats aux concours des boursiers du supérieur, une année catastrophe comme 2019 passerait pour une année normale (rappelons que Ginette y est descendu jusqu’à la huitième place dans certains classements des revues ; aussi douteux soient certains de ces classements, le statut du lycée serait très différent si l’exception devenait la norme).

Conclusion :

Dans toutes les filières sauf en PSI – qui ne contient qu’une classe sur les 10 classes de seconde année étudiées – les résultats aux concours des boursiers du supérieur sont significativement inférieurs à ceux de la population générale. Le fait que la filière PSI ait des résultats à part s’explique assez bien : la classe de PSI* a en effet un recrutement beaucoup plus étroit que celui des autres filières. Elle contient quelques élèves au sommet de la promo, aucun élève des deux derniers déciles, et est largement constituée d’élèves du “ventre mou inférieur” de la filière MPSI. Dans une zone aussi étroite et avec un effectif aussi limité, il est parfaitement normal de ne pas observer de différence remarquable.

En revanche, dans les quatre autres filières étudiées, on observe systématiquement que le décile le plus fourni relativement est le dernier, et c’est particulièrement exacerbé en filière MP.

En définitive, au vu des éléments présentés ci-dessus, il est extrêmement improbable que la sous-population des Internes de la Réussite puisse avoir des résultats “dans la moyenne des élèves de Ginette” comme l’indique le président de Ginette Alumni. En effet, une sous-sélection des IR, parmi les boursiers du supérieur ayant déjà le niveau pour intégrer Ginette, sur des critères uniquement sociaux/géographiques, n’a aucune raison de conduire à une population ayant des résultats proportionnellement meilleure que celle des boursiers du supérieur. Pire, vu les critères retenus c’est exactement le contraire qui doit se produire : sous réserve d’une population suffisamment vaste il y a toutes les raisons pour que les résultats des IR soient encore nettement inférieurs à celle des boursiers du supérieur, avec une distribution encore davantage tirée vers le bas. Et c’est exactement ce qu’on observe pour la filière MP avec le graphe que nous avons produit au début de notre feuilleton, et que nous reproduisons ci-après :

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